THE BEATLES REEDITES!

C’est fou comme les 11 septembre sont marquants. En 1962, les Beatles entrent pour la première fois en studio. Ils viennent graver « Love Me Do » et « P.S. I Love You ». Ringo Starr vient juste de remplacer Pete Best, ce qui déplaît fortement à George Martin qui impose Andy White. Un musicien de studio. Mais le batteur s’en sort mal et « Love Me Do » nécessite 17 prises. Finalement, les percussions de Ringo seront mises en avant. Petite revanche personnelle. Ils vont ensuite rapidement graver deux autres 45 tours, pour enregistrer quelques semaines plus tard leur premier album. La légende prétend que l’enregistrement a nécessité 16 heures… Nick Mason, batteur du Floyd, produira un album pour les Damned, et sera ébahi par la rapidité d’exécution. « Ils enregistrent un album en moins de temps qu’il ne faut au Floyd pour installer les micros ! ». En effet, 16 heures pour un album, c’est aujourd’hui tout à fait inconcevable.

C’est vrai, ce premier album paraît un peu bâclé. Pour tout dire, il semble un peu primaire. Personnellement, c’est l’album que j’écoute le moins. Les compositions Lennon / Mc Cartney ne sont pas encore vraiment au point, et surtout, elles ne sont pas particulièrement originales, si ce n’est dans les rythmes qui s’éloignent plus ou moins des schémas habituels de l’époque. Les saccades de « Love Me Do » sont assez intéressantes dans le genre. La version Mono ne diffère pas énormément de la version stéréo si ce n’est que l’on a l’impression d’écouter une version semblable à ce qui a été enregistré à l’époque. L’ensemble sonne plus nerveusement, surtout sur les rythmes les plus enlevés du disque.

C’est Paulo qui ouvre officiellement l’aventure des Beatles avec un « One Two Tree » historique. « I Saw Her Standing There » est un rock classique, mais dès les premières mesures, on ressent la science pop du groupe, et les mélodies en escalier, spécialité de Mc Cartney. « Misery », nettement plus classique, s’avère moins intéressante, même si l’on décèle les premières directions harmoniques du groupe, où Lennon et Mc Cartney prendront l’habitude de doubler les voix. « Anna », balade romantique d’Arthur Alexander, offre l’occasion au groupe de s’en donner à chœur joie sur le refrain sans que la chanson n’ait beaucoup plus d’intérêt que çà. En règle générale, le disque, composé pour presque moitié de reprises, est le plus intéressant lors des compositions originales.
« Chains » autre reprise, n’offre pas énormément d’intérêt. Comme toujours, on laisse le batteur s’exprimer le temps d’une chanson. Pour cela, une reprise des « Shirelles ». A l’époque, les membres du groupe apprécient beaucoup la Soul musique qui vient de la côte Est des Etats-Unis. Ce sont souvent des titres chantés à l’origine par des chanteuses. Ringo s’en sort plutôt bien, et prouve que lorsqu’on le prend un peu au sérieux, il n’est pas mauvais chanteur.
« Ask Me Why », composition originale est plutôt transparente. Sans véritable identité, elle glisse gentiment. Par ailleurs, la tendance un peu pénible à l’époque d’écrire des textes parfois très « niais » passe encore moins lorsque la chanson n’a pas grand-chose pour elle.
« Please Please Me » et voilà que l’on entre dans l’histoire. Premier titre à accéder à la tête des charts, ce titre est remarquable. La construction saccadée de la rythmique, les breaks incessants, l’harmonica qui accroche dès le départ, et la mélodie qui n’arrête pas d’évoluer, au gré des refrains, des couplets et autres ponts. Seuls les chœurs, encore un peu classiques, auraient mérité un travail plus approfondi.
« Love Me Do », et deuxième gros coup. Là, c’est l’harmonica qui fait tout le travail. Accrochant l’auditeur dès le départ. Malheureusement, la mélodie moins forte que le titre précédent, marque une légère baisse de régime.
« P.S. I love You », sa cadence chaloupée et ses accords sortant de l’ordinaire laissent présager de ce que va être le son des Beatles lors des albums à venir. Chanson charmante, bien que sonnant un peu vieillot de nos jours.
« Baby It’s You » est une nouvelle reprises des Shirelles. Lennon y démontre ses capacités vocales extraordinaires, faisant presque oublier l’originale. Il en ressort une sorte de Soul pop remarquable de douceur et de sensualité. Un beau titre, co-écrit, il est vrai par le maître Baccarach.
« Do You Want To know A Secret », encore une chanson originale est plutôt réussie, même si les arrangements paraissent un peu chiches, et que le pont paraît arriver au milieu de la chanson comme un cheveu sur la soupe.
« A Taste Of Honey » est une reprise sublime. Ils utilisent pour la première fois l’enregistrement sur double piste. A l’époque, ils étaient plutôt réticents à la « technologie ». Les choses vont rapidement évoluer. Le pont, qui change de mesure, crée un effet surprenant de cassure en plein milieu d’un titre harmoniquement assez classique, avec ses accords tout en descente.
« There’s a place » est sans doute le titre original le moins intéressant. En cherchant bien, on y retrouve des éléments de chansons précédentes, et sur la longueur, la chanson peine à convaincre.
« Twist and Shout » est sans doute le titre le plus marquant de l’album ; D’abord parce qu’aujourd’hui encore, beaucoup présentent ce titre comme étant un titre des Beatles, alors que ce titre est des Isley Brothers. Lors des séances d’enregistrement, il manquait un titre, car la coutume voulait que l’on enregistre en moyenne 14 titres (contre 12 aujourd’hui). Ils décidèrent, sur un coup de tête, de reprendre ce titre qui deviendra leur reprise la plus célèbre. Lennon a la voix totalement démolie, et finira presque aphone. Un titre historique qui vient clore un album de bonne facture, mais qui va rapidement être dépassé par les évènements.

Alors, à l’arrivée… Que faut-il préférer ? La version Mono ou la version Stéréo ? Et bien sans conteste, la version mono. Tout simplement parce que c’était à l’époque comme cela que les disques étaient conçus, et que l’écouter en stéréo n’a pas beaucoup de sens. Par ailleurs, le mix mono offre un ensemble plus dynamique, plus nerveux, et somme toute beaucoup plus rock. Mais dans tous les cas, il faut bien l’avouer, la remasterisation est une réussite totale.

Soyons honnêtes, il serait vain de faire une chronique descente des albums des Beatles. Cela a déjà été fait tellement de nombreuses fois qu'il paraît impossible de dire quelque chose de pertinent à propos de l'une des discographies les plus décortiquées au monde...

With the Beatles, deuxième album est à mon sens le véritable point de départ du groupe. Les compositions sont plus travaillées et les arrangements beaucoup plus fins que lors du premier album, « It won't be long », « All I've got to do » et « All my loving », le trio magique qui ouvre l'album suffit à le démontrer. La science des harmonies vocales est déjà au point, notamment sur la dernière, avec des harmonies en escalier qui ne cessent de monter et descendre. A ce titre, la version « Live At BBc » est encore plus réussie.

La première composition de Harrison est relativement anecdotique, et sonne beaucoup plus convenu que ses copains. Qu'on le veuille ou non, à cette époque en tout cas, au niveau des compositions, il avait un métro de retard.

Les reprises sont de bonne tenue, même si « Till these was you » par exemple a relativement mal vieillie, face à « Mr Postman » toujours aussi percutante. Lennon aurait pu faire un chanteur soul très honnête, c'est évident. « Roll over Beethoven » est LA reprise de Harrison, il la maîtrise à l'aise et ayant toujours été le plus fin des trois guitaristes, il survole la composition de Berry sans pour autant dépasser l'originale... Faut pas déconner quand même.

« You really gotta hold on me » de Robinson prouve une fois de plus que Lennon aurait pu, sans rougir, avoir du sang black dans les artères... Cette chanson me colle des frissons à chaque écoute.

Bref, ce second album, réalisé avec plus de soins, est bien meilleur que le premier et se termine sur « Money », avec, une fois de plus Lennon au meilleur de sa forme.

Alors, mono, stéréo?

Et bien, le stéréo propose une clareté ahurrissante, notamment face à l'édition de 87, tous les instruments se détachent, et toues les lignes deviennent claires... Sauf que, à l'époque, le stéréo n'était pas monnaie courante. Si le déséquilibre droite gauche n'est pas aussi présent que sur certains albums, il n'en reste pas moins une sensation étrange. Le piano de « Money » collé à gauche, existe en intro, s'entend très clairement si on se concentre dessus, mais finit par disparaître. La version mono, c'est déjà tout autre chose, c'est dynamique, et si certains instruments se fondent dans la masse pour ne plus ressortir, on a tout de même l'impression persistante d'écouter le disque dans les mêmes conditons qu'à l'époque. La version LP originale que je possède a été gravée en stéréo et possède les mêmes inconvénients que ceux du remasterisé, à la diffèrence de cette chaleur propre aux vinyles. Du coup, faut-il préférer le mono au stéréo? Et bien, ma foi, les deux sont agréables, mais l'un sonne beaucoup plus rock que l'autre. La version stéréo fait un peu gentillette et son écoute au casque s'avère, une fois le mono comparé, très inconfortable. Par ailleurs, le mixage, légèrement différent, semble mettre en avant certains parties en mono qui rendent l'ensemble nerveux et tendu
Bref, tout cela n'est qu'une question de goût bien sûr, mais à mes yeux, la version mono l'emporte. Mais pas d'une façon aussi écrasante que pour certains autres...

Né d’une expression de Ringo, lors d’une nuit où il ne savait plus vraiment où ils en étaient dans le calendrier. Un lundi, un mardi…. Cette expression évoquait le fait qu’ils bossaient à l’époque jour et nuit, sans cesse en concert. En effet, la Beatlemania était alors en pleine expansion, et l’humeur ambiante était à l’hystérie. Le disque est né du projet de faire un fil autour de cette Beatlemania, et inversement. Pour la première fois, le disque ne comporte que des compositions originales, toutes créées en tournée, dans les Hôtels. Du coup ? Et bien s’il comporte quelques perles fabuleuses, il comporte aussi son lot de compositions faiblardes, et déjà un peu fatiguées.

A l’époque, le disque a lui aussi été créé en Mono, puis mixé par Martin en Stéréo. Pourtant, cette fois, le déséquilibre que l’on a pu remarquer sur les disques précédents, et que l’on remarquera sur les suivants est moins flagrants. Voire moins gênant. La version Stéréo est donc à ce titre une véritable réussite, le son étant une fois de plus d’une grande clarté, chaque instrument se détache. Malgré tout, « Hard day’s night » en mono sonne plus rock, et moins mou, tout comme « I should have know better », titre un peu faible qui semble être un retour en arrière avec une intro à l’harmonica, mais moins percutante que les « Love me do » des débuts.

S’il y a bien un reproche énorme que l’on peut faire aux Beatles à cette époque, c’est sans nul doute l’indigence absolue de la plupart des textes. On y parle « d’amour » mais pour adolescents. Même pour moi qui ne suis pas vraiment bilingue, c’est un côté de leur carrière que je peine à apprécier. Ceci dit, à l’instar de pas mal de groupes de l’époque (Voir les textes de la Motown de l’époque….) c’est avant tout contextuel.

Si l’album en général souffre un peu d’une mollesse global, il contient néanmoins quelques bijoux comme le très chaloupé « And I love her », qui reste ma chanson favorite de la période qui précède Rubber Soul. Les arpèges de la guitare classique qui appuient le couplets me collent inévitablement des frissons, quant au pont, changeant de ton, mais pourtant très simple, il donne un visage plus léger encore à ce titre tout en grâce. Et là, surprise ! La version Stéréo l’emporte. Et haut la main. Le velours des cordes se perd dans le mix mono, alors que dans la version Stéréo, le titre prend une ampleur qui semble vouloir vous enlacer.

Le constat va être le même sur la longueur. « Can’t buy me love » sonne mieux en mono (même si là encore, le Stéréo est très honorable), et l’écho sur la voix du refrain de Lennon apparaît nettement plus clairement sur le mix mono. La chanson gagne en dynamisme lors de ce mix, ce qui était déjà le cas sur la version de chez Capitol, qu’il convient également de comparer si l’on souhaite être complet. « Things we said Today » donne aussi l’impression de sonner plus clairement en mono, avec un point particulier sur la Batterie de Ringo qui sonne sèche comme un coup de trique.

La grosse déception concerne « When I get Home » qui prend un étrange coup de vieux lors de ce mix Mono. Certains avanceront que du coup, çà sonne comme cela devait sonner à l’époque… Certes, mais si l’on compare au reste du disque, on ne peut que constater que ce morceau sonne mou et vieillot, contrairement au mix stéréo.

Le disque se termine avec « «I’ll be back », ma seconde chanson préférée, qui, là encore, donne une impression de douceur et de sérénité en Stéréo, alors que le mono étouffe un peu cette ambiance charmante. A ce propos, le mix de chez Capitol est plus dynamique, proche de la distorsion, et étrangement clair, ce qui me conforte dans l’idée que le coffret de Capitol qui regroupait tous les albums des Beatles sortis aux Etats-Unis jusqu’à Rubber Soul (puisqu’ensuite, tous les albums des Beatles sortaient mondialement sous le même format) était vraiment très bien fait et possédait un avantage non négligeable puisque chaque disque était présenté en Mono et en Stéréo.

A l’arrivée donc, cet album manque toujours de dynamisme, et certaines compositions sont très anecdotiques, faces à d’autres, beaucoup plus intéressantes. L’équilibre Lennon / Mc Cartney est lui parfait, chacun œuvrant dans sa spécialité. C’est à cette époque qu’ils décidèrent que chacun chanterait ses propres compositions, soutenus évidemment par les autres membres.

Quant au choix Mono / Stéréo, les deux sont intéressants, dans des domaines différents, et surtout durant des chansons différentes. C’est l’édition de chez Capitol qui serait pas loin de remporter le comparatif… sauf que le disque qui correspond plus ou moins à « Hard day’s night » n’offre pas le même tracklisting, ni tout à fait le même mix. Bref, pour bien faire, il faut posséder les trois, mais là… faudrait être totalement fou.

La célébrité, çà crame le bonhomme. Le quatrième opus des Beatles est l’album de l’épuisement. A peine sortit de la tornade « Hard Day’s night », disque, promo, film et tournée, que l’on remet le couvert. Seulement, faut-il encore laisser le soin au groupe de composer du nouveau matériel… Et là, ce ne fût pas vraiment le cas. Résultat ? Un album étrangement bancal avec presque autant de reprises que de compositions originales. Certains voient ce disque comme l’album country et folk du groupe. Certes, les guitares acoustiques dominent, mais finalement pas tant que çà.

Sans être mauvais, ni bon, ce disque n’est tout simplement pas le plus marquant de la première période. Pourtant, je l’aime bien. Sans doute parce que c’est le premier qui s’éloigne du schéma pop habituel, et surtout, c’est le premier a possédé des textes un peu plus consistants. Que ce soit « No reply » ou « I’m a loser », la fatigue et la lassitude commencent à sérieusement se faire sentir. Malheureusement, le temps qui leur est imparti pour la réalisation de ce disque est encore maigre, ce qui fait que le disque sonne comme le précédent, sans avancée particulière, si ce n’est l’introduction du « Fade In » pour la première fois sur un disque pop à l’intro de « Eight days a week ». A l’origine, le groupe ne trouvait tout simplement pas comment débuter correctement le disque. Il fût alors proposé de commencer le morceau comme l’on termine les autres, en montant progressivement le son.

Au-delà de çà, Lennon donne une version de « Rock’n roll music » plutôt excellent, bien que très proche de l’originale, et sa reprise de « Mr moonlight », bien que vieillotte, notamment en raison des chœurs franchement datés s’avère plutôt bien interprétée.

Dans l’ensemble, ce disque ne possède pas de tube en puissance, comme ils savaient les produire au kilomètre dans le sens où l’auditeur moyen sera bien incapable de citer une seule chanson célèbre de l’album, ce qui n’est le cas d’aucun autre album. Il y a au moins une chanson par album qui passera à la postérité, pour de bonnes ou de mauvaises raisons.

En fait, la raison à cela est toute simple. Les compositions sont tout simplement moins bonnes que d’habitude. A l’image de la pochette, elles paraissent une peu molles pour ne pas dire épuisées. Pourtant, il y a deux ou trois belles exceptions, comme ce « Every Little Thing » ou le « No Reply » d’ouverture. Il n’y a plus qu’une marche avant d’entrer dans l’histoire.

Alors, cette fois encore, la question est posée. Mono ou Stéréo ? Et bien là, je dois bien admettre, c’est match nul. Mais sur le terrain, la version stéréo paraît plus claire, plus limpide, malgré les éternels déséquilibres qui persistent et signent. Dés le premier morceau où toute la rythmique est à gauche, et seules les voix et la cymbale de Ringo se retrouvent à droite. Il faut bien admettre qu’une fois la version mono écouté, réécoutée et décortiquée, la stéréo s’avère toujours aussi inconfortable, mais ne change pas fondamentalement la couleur du disque, à l’exception de « Rock’n roll music » définitivement plus agressif en Mono. Même le « Everybody’s trying to be my baby » sonne encore plus mou du genou en stéréo. Non pas que la version Mono la rende très nerveuse, mais la composition de Harrison prend un peu d’épaisseur, alors qu’elle est pourtant peu consistante pour une chanson de clôture.

Bref, si le travail de remasterisation est une nouvelle fois véritablement remarquable tant les instruments et les voix se détachent avec une clarté inédite sur CD, les versions Mono et Stéréo jouent dans la même cour. Seul le goût de chacun pourra faire la différence.
Par contre, là ou la différence peut réellement jouer, c’est dans le packaging, qui, pour la version mono, reprend à l’identique l’édition d’origine, à savoir une pochette gatefold, avec le disque qui se glissait par l’intérieur, comprenant une belle photo au verso et quelques notes de pochettes à l’intérieur. Un truc de fondu quoi…