Soul, Funk & Black music

On reconnaît les qualités d’un artiste, notamment dans sa capacité à se renouveler. SLY AND THE FAMILY STONE, c’est avant tout le groupe de Sylvester Stewart. C’est aussi l’un des premiers groupes à mélanger les races et les ethnies (avec MG’S And BOOKER T). Dans la musique black, les génies sont courant, mais certains ont définitivement marqué les esprits et influencé la musique pour des générations. Je ne cite pas les nombreux musiciens Jazz, tels que Mils Davis, Coltrane, Mingus ou Monk, c’est une tout autre histoire. James Brown posa les bases du funk. Marvin Gaye fût ce qui se fit de mieux au sein de la Motown, pareil pour Otis Redding chez Stax. Tous ces artistes ont influencé durablement et profondément la musique moderne ? Et Sly fait parti de ces artistes. Il va changer la donne musicale des années 70, inventant le funk à la sauce Funkadelic, va influencer le rap (c’est un des artistes les plus samplés du monde hip-hop) et marquer les esprits d’artistes aussi importants que Prince ou Public Enemy. Et encore aujourd’hui, il suffit d’écouter un groupe comme DirtBombs pour comprendre à quel point la musique de Sly est importante et résolument moderne.

Sly and the Family Stone, c’est le point de rencontre le plus évident et réussi entre James brown, Otis Redding, la soul festive des Meters ou des Bar-Kays, les Rolling Stones, le gospel, le doo-wop et la pop… Un chef d’œuvre de fusion. Au passage, le bassiste du groupe mettra au point la technique du slap qui deviendra rapidement incontournable pour n’importe quel bassiste qui veut sonner un peu funk, et Dieu sait si la basse a été inventée pour sonner Funk.

Dès le premier album, « A whole new thing », et son intro (oui oui, on retrouve bien la mélodie de Frére Jacques en arrière plan de l’intro de « Underdog ») le groupe étale la concurrence et invente un nouveau son. Les cuivres de la Stax, la rythme fourmillante de James brown, les mélodies pop, les chœurs… Tout est en place et fantastique. Malheureusement, le premier album, pourtant parfait de bout en bout, ne reçoit pas un grand succès.

« Dance to the music » sera le premier succès du groupe. Poussé par la maison de disques qui voulait un album qui fasse du chiffre, le groupe pond un album pour danser. Les textes sont et seront toujours plus ou moins une plaidoirie pour l’amour, la paix et la compréhension entre les peuples. Mais là, le groupe incite avant tout les gens à danser. Il en résulte un album fondamental, certes, mais qui tourne un peu en rond. De nombreux titres se ressemblent un peu, joués à la même cadence et sur la même structure. Pour autant, ne boudons pas notre plaisir, ce disque est avant tout fait pour s’amuser et danser, et il parvient à vous faire dodeliner de la tête dès les premières notes. On peut également s’apercevoir que ce disque va influencer quelques groupes, tel que Jon Spencer Blues Explosion qui bâtira presque tout un album grâce au simple titre « Color Me true » qui a une longueur d’avance sur tout le monde rien que sur le traitement des guitares.



« Life » reprend les choses où le premier album les avaient laissées. Toujours aussi puissant et énergique, le premier titre s’appelle d’ailleurs « Dynamite ! » mais malgré tout, Sly durcit un peu le ton, notamment sur le son des guitares. Malgré les qualités incontestables de cet opus, l’on sent bien que le groupe est en fin de cycle et qu’il va être temps de se renouveler.



C’est avec « Stand ! » que les choses commencent à évoluer. D’abord parce que les textes se politisent, puis parce que le psychédélique est passé par là. La musique est plus rêveuse, moins nerveuse, mais semble parfois être un peu désabusée. Les rythmiques sont plus saccadées, plus lentes, les voix sont traitées, les wah-wah explosent. Bref, le son n’est plus tout à fait à la fête, même si dans la foulée de cet album, ils donneront l’une des prestations les plus marquantes de Woodstock, récemment immortalisée sur disque et absolument indispensable. Sur scène, c’est infernale. Deux heures de show non-stop, pied au plancher, avec paillettes et semelles compensées. Sly vient d’inventer le funk Psychédélique, Parliament, Funkedelic et tous les autres ne s’en remettront pas. Au passage, cet album comporte le plus grand succès de Sly and the family Stone, l’immense « Everyday People », reprise bien des années plus tard par Arrested Development. Indispensable.



Avec « There’s a riot goin’ on », Sly a plongé dans la cocaïne. Les relations dans le groupe se sont détériorées. Les membres vont déserter les lieux un par un. Pendant ce temps, Sly pose les bases du Funk à venir avec un disque plus psychédélique encore que le précédent, qui influencera tout autant la planète musicale, jusque Miles Davis qui mettra au monde « On the Corner » son ultime chef d’œuvre, ou encore Herbie Hancock qui montera ses « Headhunters ». Un disque énorme, mais exigeant, qui ne s’aborde plus aussi facilement que les précédents. Par ailleurs, il introduit les rythmes électroniques qui vont devenir la base du son à venir du groupe. Historiquement incontournable.



« Fresh » est le dernier album de Sly and the Family Stone a être totalement intéressant. La plupart des albums sont une suite logique et une évolution par rapport au disque précédent. Celui-ci ne déroge pas à la règle. Les rythmiques sont de plus en plus électroniques, les arrangements de plus en plus épurés, et surtout, il s’agit d’une œuvre nettement plus personnelle, à l’instar du précédent album. En effet, Sly pose les bases seul du disque, et les autres membres (enfin, ce qu’il en reste) ajoutent quelques éléments. Ce disque, nettement plus posé que les autres, apparaît comme un peu fatigué voire désabusé. Il faut dire que le leader est camé jusqu’à l’os. Malgré tout, il comporte quelques merveilles absolues dont son fameux « if you want me to stay ».



Dernier album véritable du disque, il est aussi le moins intéressant. Sly n’a plus d’énergie. Un album de funk tranquille, parsemé d’arrangements de cordes, mais sans grande conviction, la carrière du groupe, pourtant si flamboyante, s’éteint sur un opus pâlichon. Malgré tout, ce disque a pas mal de qualités et figure parmi les disques qui ont influencé la musique black de la fin des années 70.



Sly enregistra ensuite deux albums solo, dont l’un sera vendu comme un disque du groupe. Ensuite, il s’enfonça dans la came, et malgré quelques réapparitions, il ne parvint jamais à sortir du gouffre.